Emprunts toxiques :
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Exemples de dettes indexées sur la différence de taux de change EUR/USD - EUR/CHF
Ces contrats payent un taux proportionnel à la différence entre le taux de change euro contre dollar - euro contre franc suisse, quand elle est positive. Donc tant que l'euro/dollar reste au-dessous de l'euro contre franc suisse, tout va bien et on ne paie que le taux de base, souvent inférieurs à 4%. Par contre si l'euro/dollar passe au-dessus de l'euro contre franc suisse, alors le taux à payer augmente proportionnellement à l'écart entre les deux taux de change.
Illustration sur quelques collectivités
Taux à payer par quelques collectivités dont les contrats nous ont été communiqués, si le taux était fixé à l'instant présent :
- Valeur de l'euro contre dollar (EUR/USD) : 1.2852
- Valeur de l'euro contre franc suisse (EUR/CHF) : 1.2045
- Différence EUR/USD - EUR/CHF : 0.0807 = 8.07%
* Nous indiquons ici le nom de l'élu-e à la tête de l'exécutif à la date de signature du contrat : le maire ou le président de la collectivité.
** la formule de cet emprunt de la ville de Mantes-la-Jolie est plus compliquée que les autres, puisque d'une part le taux est borné supérieurement à 20% et d'autre part l'indexation débute lorsque l'EUR/USD dépasse l'EUR/CHF de 0,23. Il est surprenant que cet emprunt soit le seul de notre panel à avoir un taux borné supérieurement. Étant donné le risque de ces formules, clair pour les professionnels dès leur signature, même avant la crise, on aurait pu s'attendre à ce que les banques proposent systématiquement de borner le taux supérieurement.
Pour toute question, suggestion ou demande de correction : PS, Saint-Germain-en-Laye, Yvelines. Nous contacter également si vous souhaitez ajouter une dette de votre collectivité à cette liste. Avertissement : Cette page décrit la réalité d'un dossier complexe au mieux de nos informations. Toute omission, information caduque ou erronée sera corrigée sur simple demande dans les plus brefs délais.
Exemples de contrats
Exemple 1 : Dexia Dualys, ville de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine)
Exemple 2 : Depfa, swap avec le Sidru (siège à Saint-Germain-en-Laye, Yvelines)
La rédaction varie d'une banque à l'autre, mais la formule est identique.
Dans les deux cas on définit un taux fixe relativement bas, "Taux de base". Tant que la différence des deux taux de change reste inférieure à 0, on paye seulement le "Taux de Base". A la signature du contrat la différence des deux taux est au-dessous de la barrière. On profite donc à priori du cas le plus favorable en début de 'vie' du contrat.
Les choses se compliquent quand la différence des deux taux de change devient positive. A ce moment là on ajoute la différence des deux taux de change multipliée par un pourcentage qui varie de 25% à Rambouillet à 170% au Sidru. Ce cas est clairement moins favorable car le taux à payer ne peut que monter.
Remarques :
- La conversion des taux de change en taux d'intérêt est le point délicat de cette formule. Il faut se souvenir que 0,01 est égal à 1%, 0,1 est égal à 10%, etc. Cette conversion est indiquée au-dessus du tableau pour les conditions actuelles de marché.
- Le taux à payer n'est pas limité à la hausse : plus la différence des deux taux de change augmente, plus le taux d'intérêt à payer par la collectivité monte.
- Cette formule mélange curieusement deux unités : l'EUR/USD est exprimé en dollars tandis que l'EUR/CHF est exprimé en francs suisses. Faire la différence, c'est soustraire des carottes à des pommes de terre.
- La formule EUR/USD - EUR/CHF vaut 0 quand les deux taux de change sont égaux, c'est-à-dire quand un dollar vaut exactement un franc suisse. On peut exprimer la même formule en faisant apparaitre le facteur (1 - USD/CHF). La formule est alors : Max(EUR/USD x (1- USD/CHF), 0). On a donc une option sur le dollar contre franc suisse, dont l'effet de levier est multiplié par le dollar contre euro. Si le dollar baisse contre euro et franc suisse, le taux monte encore plus vite, par l'effet conjugué des deux termes multipliés.
- Certaines formules du tableau ci-dessus sont encore en phase de bonification, mais cela ne change rien au fond du problème : la collectivité profite actuellement de taux bonifiés de manière artificielle et au prix d'un risque futur accru (comme c'est le cas à Rambouillet jusqu'au lendemain des prochaines élections municipales). Se dire "on verra bien à ce moment là", c'est appliquer la politique de l'autruche.
Achat de dollars, vente de francs suisses
A travers cette formule, la collectivité perd si le dollar baisse contre le franc suisse. C'est donc comme si on avait acheté des dollars et vendu des francs suisses. Le montant de dollars achetés est presque toujours plusieurs fois supérieur à l'encours de cette partie de la dette. Il y a donc un effet de levier supérieur à 1. Comment qualifier cela de couverture et où est l'intérêt général ?Estimation des risques
Dans la plupart des contrats (dont tous ceux énumérés ci-dessus), cette formule n'est pas bornée supérieurement. Nous ne chercherons donc pas à déterminer un 'taux maximum' à payer par la collectivité, car il n'y en a pas.
Cependant si on veut se donner une idée de scénario défavorable mais assez probable, il suffit de faire l'hypothèse que le franc suisse continue à s'apprécier lentement contre euro (disons vers 1,30), et que le dollar revient au niveau bas observé en 2008, soit 1,60. Dans ce cas la différence entre les deux taux de change est de 1,60 - 1,30 = 30%. Pour la ville de Rambouillet, qui représente le cas le moins risqué de notre liste, le taux à payer sera alors de 2,88% + 25% x 30% = 2,88% + 7,5% = 10,38%. Pour le Sidru le taux à payer sera 4,68% + 170% x 30% = 55,68%.
Ces taux sont bien entendu très élevés, mais des taux bien supérieurs pourraient être atteints en cas de crise et de baisse prononcée du dollar.
Classification Gissler
Tout d'abord, ces formules - comme toutes celles qui sont indexées sur un taux de change - sont "déconseillées" par la circulaire de juin 2010 (voir paragraphe 1.3.3, page 15).
Les taux de change sont donc naturellement classés en catégorie 6, soit le risque le plus élevé.
Quant à la structure, elle présente un risque qui dépend du coefficient multiplicateur et de la durée d'application de la formule. Le premier point à noter, c'est qu'un coefficient de 0,30 ne signifie pas un effet de levier de 0,3, donc un classement en catégorie B. Au contraire, le coefficient lu dans le contrat doit être appliqué à chaque année. Donc dans l'ensemble l'effet de levier varie de 3 à 10, ce qui les classe en catégories 6D à 6F, là encore parmi les risques les plus élevés.
Pour en savoir plus sur cette question, dont la complexité va au-delà de celle traitée dans ce site, voir l'article "Le risque de change des emprunt toxiques" paru dans la Gazette des Communes le 30 août 2010.
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